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Prospective

Quelles perspectives pour Xserve…

Après l’abandon du Xserve RAID et les difficultés de Xserve, la virtualisation de OS X et l’iPhone peuvent-ils représenter une planche de salut ?

Boro

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Quel avenir pour le Xserve ? L’annonce de la version 2 de Xsan, le logiciel de stockage en réseau d’Apple, n’a pas été sans laisser perplexes les commentateurs : après l’abandon du modèle Cluster Node, spécifique aux grappes de serveurs affectées au calcul hautes performances et rendu superfétatoire par la modularité des Xserve Xeon, c’est au tour des Xserve RAID de tirer leur révérence en catimini, du moins sur le site américain de la Pomme : les unités de stockage redondant dont Apple s’enorgueillissait à juste titre sont encore disponibles – pour combien de temps encore – sur le site PME de sa boutique en ligne.

La solution d’Apple avait pourtant tout pour séduire, au moins sur le papier : à chaque mise à jour, c’est en effet elle qui offrait le prix le plus bas au Giga octet pour du stockage RAID en interface Fibre Channel. Reste que la dernière d’entre elles, intervenue en toute discrétion et sans même l’honneur d’un communiqué, datait du 23 janvier 2007… Autant dire que l’ex-jeune pousse prometteuse, seulement remise à jour à 4 reprises depuis son lancement en février 2003, avait été singulièrement laissée en friche…

Mais, chose intéressante, le communiqué de presse annonçant le lancement de Xsan 2 ferme pudiquement les yeux sur la sortie de scène du Xserve RAID, la solution-maison désignée à Cupertino, pour mettre l’accent sur sa qualification pour la première fois avec du matériel de stockage RAID tiers, en l’occurrence celui de Promise Technology dans certaines configurations optimisées pour Xsan. Or si bien entendu Apple mentionne toujours la compatibilité de son logiciel avec Xserve RAID, ce sont désormais les solutions de Promise Technology qui sont mises en avant sur le site américain d’Apple, le sous-domaine RAID pointant désormais sur la page d’erreur du site. Celui-ci a en effet été remplacé par un sous-domaine “storage”, lequel fait l’apologie du sous-système VTrak E-Class RAID sur le thème de la valeur ajoutée apportée par les deux produits complémentaires… ce qui est véritablement une première sur le site d’Apple, au moins depuis 2002 en Europe…

Interrogé par MacWorld, Apple a offiicialisé la fin du développement du Xserve RAID, tout en assurant par la voix de son porte-parole Anuj Nayar qu’il ne s’agissait absolument pas pour le Californien de laisser tomber le Xserve proprement dit, d’ailleurs remis à niveau un mois auparavant – pas plus que d’abandonner les marchés pro traditionnels de la marque – mais bien de se concentrer là où celle-ci peut apporter le plus de valeur : Xserve, Xsan et Mac OS X server… Pour autant, Apple continue à écouler les stocks existants et à proposer des modules d’extension à ses clients aussi longtemps qu’elle en disposera.

Reste que le passage d’une solution “tout-Apple” à une solution “Apple-et-consorts”, si elle intervient au moment où l’industrie est en train de basculer de la technologie SATA vers le SAS et lui évite d’avoir à assumer de nouveaux frais de développement, n’est pas sans poser un certain nombre de questions.

Apple passe ainsi d’une logique de “solution-maison” entièrement développée en interne à une démarche plus inédite basée sur la coopération avec un partenaire choisi, sur un modèle bien particulier… Inédite ? Voire… La transition à marche forcée vers la plate-forme Intel a reposé précisément sur ce schéma : quand Apple élaborait encore elle-même ses cartes-mères pour le G5 – et fournissait même celles des serveurs blades d’IBM – tout en étant partie prenante du développement des processeurs PowerPC, la Pomme s’est appuyée depuis 2006 sur Intel pour la fabrication de ses processeurs et des cartes logiques qui les accueillent… non sans influer notablement sur leur conception, de l’aveu-même de Paul Otellini le CEO du fondeur qui est d’ailleurs presque devenu un habitué des keynotes de Jobs.

Apple, jusqu’ici réputée pour tout maîtriser de A à Z serait-elle en train d’infléchir sa façon de fonctionner, en devenant capable de nouer de véritables partenariats ? Le modèle industriel de l’iPhone, sur lequel on a beaucoup glosé, repose en tous cas sur une bonne partie de l’expérience utilisateur déléguée à l’opérateur partenaire, choisi avec soin…

La question qui se pose, dès lors, est de savoir si, dans quelle mesure et jusqu’où, Apple va poursuivre dans cette voie… On se souvient de Steve Jobs lors du lancement de l’iPhone, ne résistant pas au plaisir d‘égratigner Microsoft au passage en citant Alan Kay : “les gens vraiment sérieux à propos de logiciel devraient faire leur propre matériel”. Suivez son regard… Or la Pomme est en train d’inventer, petit à petit et suivant la méthode du doigt de pied trempé dans le bain pour en tester la température, une 3e voie entre le “rien en dehors d’Apple” qui a prévalu pendant de longues années et le “chacun pour soi et Microsoft pour tous” qui a conduit la concurrence à tant de crashs systèmes. Il s’agit en l’occurrence de travailler avec un partenaire privilégié – ou plutôt de le faire travailler à son service, et si possible le leader dans son domaine – sur un secteur complémentaire, afin de pouvoir se concentrer sur des segments identifiés comme stratégiques tout en proposant des solutions d’excellence…

Malgré son 4e rang parmi les serveurs UNIX, le Xserve se retrouve à la peine face à ses concurrents, faute surtout d’un soutien efficace et d’un suivi de clientèle digne de ce nom, ce qui lui a même coûté un certain nombre de marchés de renouvellement… Or on sait que c’est Windows Server avec ses outils collaboratifs qui a représenté l’un des obstacles principaux au retour en force du Mac dans les entreprises. Or les chiffres donnés par l’institut Gartner ne sont pas très optimistes : Apple aurait ainsi constamment perdu des parts de marché depuis 2005, passant de 0,6 à 0,2% en 2006, et pour finir à peine 0,1% en 2007 avec moins de 10 000 machines… Banalisées depuis la fin 2006 avec l’adoption à son tour de la plate-forme Intel proposée par ses compétiteurs, le Xserve n’a plus bénéficié de l’effet de levier d’Altivec sur le calcul scientifique.

Mieux, depuis la dernière révision des Mac Pro en janvier dernier, ceux-ci sont désormais capables d’embarquer jusqu’à 4 To de stockage sur 4 disques ATA ou SAS au choix, au même titre que le Xserve, et c’est à dire davantage que le Xserve RAID lors de sa sortie. Et ce n’est pas tout : les Mac Pros sont à leur tour dotés d’une 2e connexion Ethernet en standard. Est-ce le retour dans la stratégie d’Apple du “serveur de bureau” pour les très petits groupes, comme du temps des grandes heures et des premiers pas d’internet ? Si l’on considère le re-positionnement de Mac OS X Server Leopard à côté de sa vocation désormais traditionnelle de “mule” pour le calcul scientifique, l’hypothèse n’est pas à écarter.

Trop souvent oubliée, dès 1998 les spécifications de la version server de OS X était planifiée pratiquement en même temps que la version client de Rhapsody… Malgré sa facilité d’utilisation, celle-ci n’a jamais pu trouver sa place, coincée d’une part entre Microsoft Server et d’autre part entre les diverses distributions Linux, et au fur et à mesure que la part de marché des postes clients sous Mac OS fondait comme neige au soleil… L’iPhone tout prochainement ouvert aux entreprises, avec désormais un kit de développement logiciel enfin à même d’en faire une véritable plate-forme grâce à OS X peut-il jouer le rôle de Cheval de Troie dans les entreprises, en jouant le rôle tenu par l’iPod auprès des particuliers ? Les DSI ne seront en tous cas pas facile à convaincre…

Ses serveurs boudés par les grands comptes, La Pomme peut-elle s’appuyer sur une stratégie de licence de son OS à un partenaire de confiance, éventuellement par le biais de la virtualisation, pour faire pénétrer Mac OS X serveur plus avant dans les entreprises tout en laissant vivoter une ligne Xserve ? Voilà qui ne manquerait pas de sel, plus de dix ans après avoir mis fin à la dispendieuse expérience des clones sur le marché professionnel… Il est vrai que c’est un véritable héritier du Newton qu’Apple s’apprête à présenter avec la nouvelle version du firmware de l’iPhone… avant de ressusciter l’eMate ? Le premier et le second du secteur des serveurs ne sont autres que IBM et HP, deux vieilles connaissances d’Apple, qui ont respectivement capté en 2007 31,1 et 28,3% du marché en valeur, selon Gartner. Les deux constructeurs pourraient-ils pour autant de nouveau travailler avec un partenaire réputé aussi difficile qu’Apple ? Rien n’est moins sûr… Reste à également savoir pour quel type de services…