Reflexions sur le piratage

Je veux d’abord dire que je déteste le piratage, mais c’est un phénomène qui a tendance à se développer…

Au regard de l’actualité, je pense que l’on simplifie trop la question du télechargement. J’ai voulu donc donner mon point de vue , en me posant des questions et en essayant de répondre sur les profils des pirates puis sur le piratage lui même ..

Il existe, à mon sens, divers profils :

L’occasionnel :

« Je veux écouter une musique qui me plait dans un format pratique (mp3) car je n’ai pas envie de commander un cd ou aller dans un magasin pour parfois essayer de trouver l’introuvable … »
Itunes a été la réponse pour eux, format légal, pas contraignant, la possibilité d’accéder à un vaste catalogue et la garantie d’écouter le bon mp3 avec une bonne qualité d’écoute.

Le possesseur d’originaux :

La personne a un 33 tours, une vieille cassette vidéo, elle souhaite avoir l’œuvre dans un autre format.
Ainsi les propriétaires de laserdisc ou dat, savent que si leurs lecteurs tombent en panne, tous leurs supports deviendront inutilisables à jamais et parfois cela représente une fortune.
De plus, certains films n’existent pas en dvd comme la version originale de la guerre des étoiles…

Le révolutionnaire :

« la culture c’est trop cher ! »
Si on regarde le prix du dvd de Titanic et un cd de Queen sur Amazon, on constate que le cd est plus cher, mais est ce logique ?

Le film est un produit avec un coût de revient plus élevée, support, location de décors, traduction des voix et des textes, rémunération des acteurs, des compositeurs, ingénieurs, techniciens, musiciens etc etc… Le produit est localisé.

Alors que le cd a un coût de production moins élevé, des contraintes bien moindres, une durée de commercialisation plus longue.
Plus surprenant, le DVD de Queen : « Greatest hits » est vendu 22,87 euros contre 22.07 euros pour le cd qui lui, date de 1991.

80cts pour avoir un meilleur son et des clips, la différence de prix est difficilement compréhensible.
On peut aussi s’interroger entre le paradoxe des salaires de certains acteurs et chanteurs, qui affichent leur fortune, et ceux qui nous expliquent que l’industrie musicale est au bord du gouffre.

Le testeur :

« je veux tester avant d’acheter »
Pourquoi le consommateur n’a-t-il pas le droit de se plaindre ou demander un remboursement ou des dommages et intérêts quand un produit fait perdre à son utilisateur, des jours de travail ?

Si un administrateur de parc installe un produit buggé, cela va générer pour son entreprise des désagréments et des pertes financières, et tout recours est impossible…
On peut donc comprendre que certains veulent tester les produits AVANT d’acheter….

« j’attends la version collector » …
Le prix d’achat étant élevé, entre 20 et 30 euros, on regrette amèrement l’achat d’un album pour une chanson, ou d’un dvd quand 2 mois après, se trouve à la vente la version collector, puis spéciale, puis ultime, dts, longue, inédite, réalisateur …
Le divx devient support « d’attente », on regarde le divx en attendant le dvd …
Pour les jeux, cela peut éviter quelques surprises du type plantage à répétition ou vo sous titré.

Le candide :

« pourquoi je dois acheter en magasin car c’est gratuit ailleurs ? »
Les arguments de morale s’opposent aux financiers.
N’oubliez pas que les industriels ne produisent que ce qu’ils vendent.
Et un mp3, un divx, n’aura jamais la qualité d’un original à cause de la compression.

Le pauvre passionné :

« Je n’ai pas les moyens et j’en ai besoin ».
Etudiant en infographie ou en réseaux, la personne récupère un produit pour se former car elle n’a pas les moyens de s’acheter des logiciels professionnels à des milliers d’euros.
Ainsi, je pense que les versions de démonstrations avec quelques limitations (fonction de sauvegarde désactivé, …) est une réponse efficace. Une personne connaissant très bien un produit devient dans le temps un client fidèle.

Le collectionneur :

« je veux tout »
Le sauveur du patrimoine de l’humanité se dévouant à télécharger et à graver le moindre mp3 ou la moindre vidéo.
Le client parfait des revendeurs informatiques, grand consommateur de cds, dvd, graveurs, disques durs, machines complètes …
Au final il n’écoute rien, ne regarde rien, mais il est heureux car il a tout … Il est le Bill Gates du piratage, les autres lui doivent le respect car il a tout … Ce type est plus proche d’un malade pathologique qu’un vrai pirate.

Le revendeur :

« je te vends la copie de matrix et je te donne photoshop»
…
La partie que je déteste à plus d’un titre. Je ne trouve aucune excuse à ce type de comportement car beaucoup sont attirés par le gain.
Vrai parasite, se nourrissant des auteurs, et de ceux qui veulent faire découvrir par des moyens illégaux une œuvre.

J’ai évoqué quelques profils de personnes mais il existe aussi les entreprises.
Les raisons sont, là aussi, multiples, manque de moyens, test du produit, dépannage, installation sauvage d’un utilisateur.

Le piratage est-il rentable ?
Abonnement adsl, achat d’une ou plusieurs machines (pour être relié à la tv par exemple), achat du graveur, des supports, temps passé à la recherche …
Cela a un coût, la location puis l’achat après quelque temps d’un dvd original est sûrement une solution moins chère.
Un film se regarde une fois ou plusieurs fois, sur une longue période, la solution légale est donc la plus avantageuse …
Et la qualité ne sera jamais la même …..

Mais le piratage est il si mauvais que cela ?
Je prends l’exemple du mp3 : il permet de vendre des ipods et autres baladeurs, des platines mp3, de vendre de la musique, de faire connaître des artistes à moindre coût, des revenus par les taxes sur tous les supports informatiques.
Aujourd’hui l’achat d’une carte mémoire pour appareil photo, un disque dur pour augmenter la capacité d’un ordinateur pour installer des jeux, des applications, une version de linux, des photographies génère des profits pour l’industrie musicale.

A noter le manque de justice envers les développeurs de jeux et d’applications, qui sûrement sont les plus piratés et ne perçoivent aucun revenu des taxes.
Les étudiants formés sur les applications deviendront des consommateurs légaux et fidèles du produit (office, photoshop, …). Certaines personnes affirment que c’est grâce à des protections moindres que des produits se sont imposés.

Le piratage détruit il l’industrie de la musique ?
je n’ai pas de réponse…
Les certaines enquétes démontrent que non, au contraire les gros téléchargeurs sont les plus acheteurs.
Si un album se copie 100 fois illégalement, est-ce que cela signifie que 25, 50, 75 personnes de plus l’auraient acheté ? …
Si un film ou un cd audio ne se vendait pas car simplement il était mauvais ? ou en décalage avec les goûts du public ….

Sur le site du SNEP
vous pourrez lire, par exemple, les ventes de disques en France entre le 1 er semestre 2002 et 1 er semestre 2003
au niveau des unités vendues

Singles – 17,4%

Albums – 5,5%

Vidéo + 77,5%

Statistiques des ventes de l’année 2002

Singles + 3,6%

Albums + 2,3%

Vidéo + 28,3%

Lorsque on regarde la vente des singles la chute est spectaculaire , mais avez vous essayé d’acheter un single ?
J’ai pris l’exemple, totalement au hasard, de Nolwenn et son titre “cassé”, je ne l’ai pas trouvé sur amazon, sur fnac.com, tout juste sur alapage à environ 5 euros livrable en 5 jours …
Alors qu’avec itunes il me couterait 1 euro,, livrable en 1 mn 😉

Le single est aussi victime du SMS, les adolescents préférent investir dans un téléphone portable, et tous les services payants rattachés (logos, sonneries, sms, …)

De plus , si un secteur souffre de la baisse de ses ventes cela peut être aussi à cause de la conjoncture … Les voitures ne se téléchargent pas , mais elle se vendent moins …
Mais leurs prix baissent , pour faire remonter les ventes …

Mais peut on croire sérieusement que les abonnés ADSL en 512 ou 1024 s’abonnent au débit pour lire leurs mails, ou lire les news de Macplus ?
Qui n’a jamais entendu “n’achete pas , je te le télécharge” ?
Qui a le courage un vendredi soir d’aller en grande surface, acheter le dernier single de Britney Spears , prendre un moyen de transport, perdre 30 mn ou 1 heure dans le magasin , revenir chez soi, mettre le cd illisible sur sa chaine, à cause du copy control, et incopiable sur son Ipod acheté 550 euros ?

En conclusion , je pense qu’il n’y a pas un moyen de réduire le piratage mais plusieurs méthodes en fonction des profils.
Créer de lourdes peines ne sert à rien, les pirates penseront il y a des millions de « copieurs», ils seront donc introuvables …
A croire les rumeurs , dans quelques années on mettra une personne en prison pour avoir télécharger un mp3 …

Même si le téléchargement pénalise le trafic des fournisseurs d’accés, le piratage est pour eux un vecteur d’expansion et ils s’en servent comme argument commercial à travers certaines de leurs publicités…

La forme du piratage que nous connaissons est un défi et la réponse est une révolution technologique et intellectuelle.
Qui aurait pu prévoir l’idée et le succés d’itunes , il y a deux ans ?
D’autre marchés s’ouvrent comme la vidéo , le jeu , les applications , et que sais je encore …
Les proportions du piratage diminueront naturellement face aux solutions légales et adaptés.
A quand la solution forfait adsl + telechargement mp3 illimité à 30 euros ?

Et je me répéte quelque soit la raison, le piratage est un délit puni par la loi et aucun argument ne permet d’ échapper à une condamnation ..