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Prospective

Interview : Pfeiffer Consulting

Avec Vista, Microsoft espérait faire la démonstration que son retard sur Mac OS X était rattrapé. Le dernier rapport de Pfeiffer Consulting montre qu’il n’en est rien, bien au contraire.

Boro

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Andreas Pfeiffer a été rédacteur en chef puis directeur de la rédaction de la revue SVM Mac pendant dix ans, avant de créer sa société Pfeiffer Consulting en 1998. Spécialisé dans le monde des technologie numériques et des médias, la société offre conseils stratégiques et services de benchmarking de productivité. Pfeiffer Consulting est éditeur de nombreux rapports d’études et publié le Pfeiffer Report on Emerging Trends and Technologies.

MacPlus : Bonjour Andreas. Pfeiffer Consulting est bien connu pour ses activités de conseil et d’évaluation sur le secteur des medias numériques. Les nouveaux matériels ou applicatifs sont pesés dans un environnement de travail bien particulier, bien souvent celui de la PAO. Vous avez, l’an passé, modélisé le concept de “friction de l’interface utilisateur” (User Interface Friction) : quels en sont les principes, et quel est son intérêt?

Andreas Pfeiffer : La friction de l’interface utilisateur est simplement tout ralentissement imposé à un utilisateur par l’interface. Cela concerne l’OS, bien sûr, mais aussi les logiciels, voire les appareils comme les baladeurs ou les caméras numériques. C’est un concept essentiel pour qui veut comprendre la qualité de l’interface utilisateur, puisqu’il permet de définir et de mesurer des aspects qui paraissent à priori intangibles. Ce qui nous à amené à modéliser le concept de User Interface Friction était un projet d’étude sur les ordinateurs Mac et Windows dans le monde de l’édition et de la création graphique: lors de nos interviews et focus groups auprès de grands éditeurs dans 6 pays différents, les utilisateurs persistaient à qualifier le Macintosh comme plus fluide, plus productif, sans pouvoir pourtant quantifier leurs perceptions. Nous avons donc décidé de définir des tests de productivité spécifiques, mais nous nous sommes vites rendu compte que même le langage dont nous disposons pour décrire une interface utilisateur manque de concepts et de clarté. Nous avons donc défini non seulement “User Interface Friction” (le terme était littéralement inexistant selon Google quand nous avons lancé la première étude il y a un an) mais aussi d’autres notions essentielles comme “Menu Latency” (latence des menus) ou “concept confusion” (confusion des concepts), les deux des problèmes récurrents sur Windows. (Le rapport complet sur les différentes notions et aspects de User Interface Friction est disponible sur le web).

MacPlus : Vous avez ensuite appliqué une batteries de tests à Windows XP et à Mac OS, regroupés selon les 3 éléments principaux qui composent l’interface utilisateur d’un OS : l’interaction avec les menus, l’exécution des tâche sur le bureau et l’efficacité de la souris. Sans surprise, les résultats ont confirmé l’intuition empirique des professionnels de la création qui effectuent des tâches de précision avec leur souris tous les jours : l’interface utilisateur du Mac – de Mac OS X – était beaucoup plus productive que celle de Windows XP. A quoi cela est-il du selon vous ?

Andreas Pfeiffer : Ces problèmes de fluidité sont en large partie dus à la latence des menus et les problèmes de précision de la souris. Cela dit, tous les programmes ne sont pas pareils: alors que Microsoft Word souffre des problèmes de latence des menus, ce n’est pas le cas pour Excel, qui dans nos tests était aussi fluide sur Mac que sur PC. Mais c’est la seule application ou nous avons constaté cela: des logiciels comme InDesign ou Photoshop sont clairement plus efficaces sur Mac.

MacPlus : Il y a de cela 2 semaines, vous avez publié un nouveau rapport, qui compare cette fois Vista, la nouvelle mouture de Windows avec OS X 10.4 Tiger, mis aussi XP la version précédente de l’OS de Redmond. Or dans ce cas, les résultats sont apparemment contre-intuitifs : sur le chapitre de la latence menus Vista est 20% plus lent qu’XP, la différence est encore plus importante entre Vista et XP en ce qui concerne les tâche du bureau et quant à la précision de la souris, le taux d’erreur est alarmant (0,52 sur Vista contre 0,40 XP et 0,08 OS X) au point que vous lancez une mise en garde aux professionnels de la création qui envisageraient de faire la migration vers Vista. Est-ce que vous vous attendiez à de tels résultats et à quoi sont dues ces piètres performances de Vista ?

Andreas Pfeiffer : Certains problèmes sont simplement liés à des décisions de design d’interface aberrantes: l’effet “fade-in” des fenêtres dans Vista est peut-être impressionnant pour un utilisateur de XP, mais cela devient très vite agaçant. D’une manière général, le comportement des menus dans Vista est nettement moins efficace que sur XP: attraper un article sur un sous-menus dans Photoshop, par exemple, peut être très frustrant.
Par ailleurs, le comportement de la souris est alarmant dans Vista: Alors que Windows 2000 et XP avaient amélioré les choses par rapport à a Windows 98, Vista est clairement moins précis, ce qui résulte dans un ratio d’erreur important. C’est d’autant plus inquiétant que les problèmes de précision des souris sous Windows est bien connu (nos premiers tests en la matière ont été publiés en 1998, et beaucoup de professionnels des arts graphiques sont conscients du problème.

MacPlus : Aero est-elle seule en cause?

La cause de ces problèmes est certainement un ensemble de choses; cela dit, la démarche derrière Aero est de faire “joli” plutôt que de faire efficace: l’effet “Flip3D”, l’équivalant d’Exposé sur Mac OS X, est peut-être plus impressionnant pour un novice, mais pour accéder à une fenêtre parmi dix ou vingt, on ira certainement plus vite sur Mac.
Le problème de base, c’est une différence d’approche entre Apple et Microsoft. Apple est très “user expérience driven” [NDLR : mobilisé sur l’expérience utilisateur], c’est-à-dire que la société recherche toujours avant tout une expérience satisfaisante pour l’utilisateur (d’où le succès de l’iPod). Si on regarde Microsoft, c’est une société entièrement basée sur les fonctionnalités. Pour Microsoft, plus d’options et de “features” est toujours mieux. Pour Apple, une option ne vaut que si elle est adopté par une large partie des utilisateurs. (Il y a d’ailleurs un exercice très intéressant, qui consiste à comparer les recommandations que les deux sociétés donnent à leurs développeurs en termes d’interface utilisateur. Ça vaut le détour)

MacPlus : Les utilisateurs les plus anciens de Mac OS se sont plaint eux-aussi dans une certaine mesure d’une manque de réactivité de leurs machine par rapport à Mac OS V9, jusque disons la version 10.3 Panther de l’OS. On avait même l’impression fugitive sur Jaguar (OS X10.2) que la machine “se ramassait” avant de bondir, comme un félin. Selon vous, le problème est-il comparable, et Vista peut-il être amendé ou est-ce le code qui a fait définitivement trop de “gras”, de version et version?

Andreas Pfeiffer : C’est exact que les premières moutures de Mac OS X pouvaient être frustrants pour les habitués de Mac OS 9. Cela dit, le changement entre les deux OS était total, bien plus profond qu’entre XP et Vista. Bien sûr, on peut s’imaginer qu’à moyen terme Microsoft améliore la friction de l’interface utilisateur. Encore faut-il qu’ils en ressentent le besoin… Et j’ai malheureusement l’impression que les notions d’une “bonne” interface utilisateurs divergent profondément entre Apple et Microsoft.

MacPlus : Cette semaine le gouvernement français lance son opération “Internet accompagné”, qui vise à inciter les ménages qui ne seraient pas encore équipés d’ordinateurs à franchir le pas : on y trouve notamment une formule “Multimédia” et “Loisirs numériques” pour ceux qui désireraient s’essayer aux loisirs créatifs. Apple ne fait pas partie des constructeurs associés à l’opération. Quel conseil donneriez-vous à un particulier qui songerait à casser sa tirelire pour l’occasion?

Andreas Pfeiffer : C’est une question moins facile que cela en a l’air. Il est évidemment scandaleux que le gouvernement décide à ce point de faire l’impasse sur la diversité du marché, surtout en 2007. Cela dit, il y a un vieil adage, qui est que le meilleur ordinateur est celui que l’on remarque le moins. Pour quelqu’un habitué sur un PC à son lieu de travail, et dont tout l’environnement amis/famille est utilisateur de Windows, ce n’est pas un choix facile. Ceci étant dit, aujourd’hui, ce n’est plus vraiment un problème, grâce aux Macs Intel: mes recommandations serait donc de commencer sur Mac, puis de passer sur BootCamp/Windows si cela se passe mal. Mais le problème du Mac est avant tout la peur d’inconnu. Et Apple est devenu très populaire…

Pfeiffer Report on Emerging Trends and Technologies
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