Suivez-nous

Interview

Entretien : Boom-Mobile

Les Génevois de Boom-Mobile proposent depuis 2007 aux entreprises une offre de communication sur mobile multi-plates-formes. Jérôme Allien, son dirigeant, ne tarit pas d’éloges à l’égard de l’iPhone.

Boro

Publié le

 

Par

JA2009.jpg

JA2009.jpg

MacPlus – Les studios qui proposent des applications pour iPhone «sur mesure» aux entreprises qui n’ont pas en interne les ressources de développement poussent en ce moment un peu partout comme des champignons. Quelles sont les spécificités de Boom-mobile ?

Boom Mobile:  Boom a les ressources en interne et travaille sur toutes les plateformes, iPhone, Blackberry, Symbian60, Android (pas Windows mobile parce que trop insupportable :-))

Boom est une société qui fait de l’expertise mobile, spécialisée et dédiée entièrement à ce sujet.

Nous faisions des applications/widgets avant l’arrivée de l’iPhone, en J2ME et Flash lite. Beaucoup d’agences web et digital proposent de l’iPhone mais font appel à des sociétés comme Boom. Nous sommes sous-traitant mobile de plusieurs agences de ce genre. Il y a même des agences qui font de l’iPhone pour qui nous développons les versions Android ou Blackberry.

MacPlus – En quoi l’iPhone est-il spécifique par rapport aux autres plate-formes mobiles, du point de vue du développement des applications bien sûr, mais également de celui de ses utilisateurs ? Peut-on d’ailleurs encore dresser une typologie des utilisateurs d’iPhone ? 

Sans hésitation, la différence majeure est que le développement n’est fait que pour un seul «device». Pas de problème d’adaptation de taille, de processeur… Donc, plus performant. Pour l’utilisateur, c’est l’expérience qui fait la différence. Les «touch screen» des concurrents de l’iPhone sont encore loin en terme de fluidité, d’ergonomie générale, d’expérience. Pour finir, l’AppStore, le système de distribution des applications, joue aussi un rôle fondamental. La simplicité d’utilisation ne se retrouve pas chez les concurrents. Les Front Store, Market et autres ne sont pas aussi bien pensés et d’ailleurs n’ont pas les mêmes chiffres de téléchargement.


Boom Mobile SA, société genevoise créée il y a 4 ans, est l’une des sociétés suisses accréditées à l’iPhone Developer Program, positionnée sur un service d’expertise en communication mobile aux plus grandes agences médias et publicitaires, ainsi qu’aux marques en direct. A partir de là, elle propose aussi ses propres produits ou services, souvent en partenariat avec ses clients.

Son expertise s’étend de l’élaboration des concepts, à la mise en place des campagnes de communication, des produits ou services selon le cas. Nous maîtrisons tous les formats de contenu (J2ME, Flashlite, Xcode, Androïd,…) ainsi que toutes les méthodes de distribution (SMS premium, Bluetooth push, AppStore, Front Store, Market…).

Parmi ses clients, on compte Artravel, Baume & Mercier, Boucheron, Chaumet, 1664, Carugati Automobiles, CICR (Comité International de la Croix-Rouge), DeWitt, Edipresse, Firmenich, Golay, IWC, Ringier / Edelweiss Magazine, Sidaction, Soon Magazine, UBS et parmi ses partenaires Euro RSCG, Electron libre, Label, Mediatonic / Medianima, Moser, Zenith Media, Bemberg, Gedenk, Media, Rio Grande

MacPlus – A quels clients vous adressez-vous, et à quels types de besoin une application iPhone peut-elle répondre qui ne puisse être satisfaits sur une application Web par exemple, ou bien pour un client ultra-léger plus classique comme un netbook ou un Ultra-mobile PC ?

Nos clients sont des marques de luxe type Chaumet, Baume et Mercier, IWC… des organisations comme le CICR, Sidaction, des artistes comme le designer Philippe Cramer, ou la poète Carmen Campo Real, des magazines comme Edelweiss, Artravel ou encore des événements comme la Snow Golf Cup. Ils ont tous des besoins différents mais leur motivation commune pour une communication sur support mobile est de proposer un accès à leur service ou produit à tout moment et en tout lieu. Les mobiles proposent aujourd’hui des options qu’une application web ou un netbook n’apportera pas comme la géolocalisation ou les push notifications.

Avec un netbook, même connecté avec une clé 3G, on ne se fera pas guider pour trouver un théâtre ou un commerce. De la même façon que l’on a trouvé internet génial parce que l’on avait plus à aller sur place pour avoir une info, avec le mobile on n’a plus à attendre d’être à la maison ou au bureau pour avoir accès à l’information ou au service. Mot d’ordre: instantanéité et mobilité, notamment grâce à la géolocalisation et/ou les push notifications (système iPhone proche du SMS sans le coût) où l’information est donné «en lieux et en temps réels». Les interfaces de type «réalité augmentée» proposeront un lien encore plus direct qui rendra la dimension mobile encore plus évidente. Nos clients sont aussi intéressés par les résultats, les outils statistiques à disposition, les retours directs et indirects qu’enregistrent le support.—–

MacPlus – Est-ce que cela passe obligatoirement par la production d’un contenu innovant, ou est-ce qu’une présentation différente de contenus plus classique, sans même parler de redéfinir l’expérience utilisateur, apporte une valeur ajoutée suffisante selon vous ?

Oui, notamment pour accéder à une information sans attendre. Cela dit tout dépend de l’objectif fixé. Une marque de luxe va évidemment jouer la carte expérience, l’organisation humanitaire sera plus intéressée par la rapidité et la facilité d’accès à l’information. Il est important de saisir que le fait de faire une application iPhone ou mobile ne promet pas un succès assuré, tout comme le web il y a 10 ans si l’adresse web n’est pas présente sur le reste des supports de communication, elle existera mais restera à un faible taux de téléchargement. Si une application utilise bien les capacités du support et qu’elle est bien communiquée, elle peut créer un buzz. Et même si la barre s’élève chaque jour avec de nouvelles app qui sortent, c’est encore possible avec de bonnes combinaisons de contenu, expérience, utilité…  

MacPlus – Quels sont les business models qui sont possibles, du coup, et pour quels modes de rémunération ? Comment cela s’insère-t-il dans une stratégie d’entreprise, ou bien de marque ?

Si vous pensez à une application de communication vendue à l’utilisateur, il y a peu de chance que ça marche. Les utilisateurs ne sont pas crédules et ne veulent pas payer même quelques centimes pour de la pub. Une application payante doit apporter à l’utilisateur quelque chose qu’il ne pourra pas trouver sur le net. Pour acheter une application, il faut qu’elle ait une réelle valeur ajoutée réelle. En revanche, il y a un «nouveau» business model évident aujourd’hui, c’est le sponsoring d’applications gratuites. Une application très téléchargées et utilisée est un espace publicitaire interactif de qualité.

MacPlus – La géolocalisation et la réalité augmentée semble avoir le vent en poupe actuellement. Quel est l’intérêt pour l’utilisateur des voir peu à peu «bombardé» de sollicitation, au risque de voir celui-ci un jour les refuser toutes, en définitive, et finir par éteindre son portable ?

Comme tout autre média, le mobile souffrira de dérangements intempestifs, c’est déjà le cas avec les SMS. Mailing et e-mailing, spots radio, TV, web banner… tous les médias sont encombrés de publicités. 

Le mobile ne fera pas exception. La publicité permet aux utilisateurs d’accéder à des applications gratuites et c’est une méthode de rémunération pour les développeurs d’applications. Faut-il payer pour ne pas voir de publicité ? Oui sûrement mais l’ambiance économique actuelle ne favorise pas le service payant. C’est le même débat que presse gratuite ou payante dont on parle beaucoup en ce moment.  

Avec le mobile, on peut refuser les push notifications aussi simplement que de se mettre en mode silencieux. La géolocalisation et la réalité augmentée ne sont pas intrusifs. C’est ce que l’on en fait qui peut l’être. Sauriez-vous vivre sans e-mail, sans Google… Est-ce que la publicité sur Google gêne l’utilisateur ou est ce qu’elle répond à sa recherche ?—–

MacPlus – On a même parlé récemment de puces RFID intégrées à l’iPhone : quels usages y voyez-vous, et est-ce vraiment de l’intérêt de l’utilisateur d’accepter un nouvel outil qui va scruter encore un peu plus ses comportements au passage, officiellement pour lui offrir un meilleur contrôle sur son environnement ?

RFID et iPhone, ça fait rêver ! On peut imaginer tant de développements: nouveau mode de paiement, déclenchement automatique d’application informative, récolte d’informations quasi constantes, etc. Mais aussi une formidable méthode de tracking permettant d’analyser encore mieux les comportements des utilisateurs et de leur proposer «la bonne info» au bon moment, voire de la devancer. Oui, il s’agit encore de publicité déguisée, tout comme les produits placés à hauteur des yeux dans les grandes surfaces ne sont pas là par hasard !

Comme pour le reste, c’est dans la nature de l’homme, la nouveauté, la différence, le changement nous dérangent. Et pourtant, on y succombe à chaque fois et on s’organise plus ou moins bien pour ne pas souffrir des effets secondaires. Ce qui nous fait peur, nous excite tout autant. Oui le tracking peut avoir des effets pervers, mais si vous avez essayé les moteurs de sélection comme Genius sur iTunes, vous aurez vite compris que l’envie de découverte dépasse de loin celle de la protection de données personnelles.

Je ne crois pas qu’il faille se poser trop de questions sur l’invasion des nouvelles technologies dans nos vies. Ce sont les mêmes inquiétudes qu’il y 15 ans au sujet d’internet, puis sur les Palm et les mobiles. 

Côté utilisateur : est-ce que cela va déranger? Intrusif ? Dangereux dans de mauvaises mains ? De nos jours, plus personne ne met en doute l’utilité d’internet. Les applications sur mobile ne peuvent pas exister sans internet (téléchargement, info live…). Ce n’est pas une nouveauté mais une continuité. Et les questions d’intrusions et les abus ne proviennent jamais de la technologie développée par l’Homme mais de l’Homme lui-même, toujours capable du meilleur comme du pire. 

La question que je me pose personnellement, c’est «comment ferons-nous pour vivre déconnectés» ? Serons-nous capables de vivre déconnectés en ayant à disposition des interfaces de réalité augmentée, la géolocalisation, les puces RFID et d’autres à venir ?

Ce sera comme vivre sans yeux pour voir, sans oreilles pour entendre, sans bouche pour parler. Imaginez l’étonnement d’un adolescent dans 20 ans: «Quoi ! il faut que je rentre dans le magasin pour savoir si il y a quelque chose qui m’intéresse ! Non mais ça va pas la puce dans ta tête !» 

MacPlus – Cela pose tout de même un certain nombre de problèmes, y compris d’ordre éthique ou philosophique : si les parcours des clients sont « fléchés » et scrutés dans n’importe quel supermarché, c’est pendant 1h30 au maximum une fois ou deux par semaine. sauf à prendre une carte de fidélité du magasin, ce parcours reste anonyme. Dans un site de commerce électronique comme Amazon, où le tracking est élevé au rang d’un art et où l’offre a tendance à devenir de plus en plus globale, c’est encore plus problématique. Avec un smartphone comme l’iPhone, la multiplicité des usages fait qu’on est et sera en mesure de contrôler – de suivre et d’anticiper – la plupart des comportements. Alors que les grandes sociétés prennent de plus en plus de liberté avec utilisation qu’elles peuvent faire des données personnelles, est-ce que c’est vraiment le monde dans lequel vous voudriez habiter ?

Vraiment ? Non, mais ai-je le choix ? J’ai déjà un sentiment curieux en allant déclarer la naissance de mon enfant à la mairie car le simple fait de mettre son nom, celui de ses parents, ses signes particuliers… Il est déjà fiché après quelques heures d’existence.

Peut-on vivre hors du groupe? Il suffit d’une «différence» pour que l’appartenance à un groupe de pair ne soit pas évidente (couleur, accent, look, religion…). La collecte d’information est naturelle lors de l’appartenance à un groupe, et à priori n’a pas de raison de devenir néfaste. Au contraire même, lorsqu’elle permet une connexion souhaitée entre des individus et une offre de services, dont il est de plus en plus difficile de ne pas se servir.
Doit-on avoir un smartphone, une adresse e-mail, un site, une page sur Facebook? On est toujours libre de ses choix et pour exemple, je n’ai pas de page Facebook, mais je dois avouer que plus d’une fois, cela m’a embarrassé, professionnellement parlant, de ne pas «en faire partie».

Oui, il y a déjà des utilisations abusives et je comprends ceux qui s’en méfient. Mais en étant acteur dans ces développements, il me semble avoir davantage de maîtrise. Cela ne m’empêche en rien de conserver mon éthique et ma philosophie que j’applique à mon entreprise comme à ma propre personne. Je freine souvent les envies de buzz virales de mes clients en leur expliquant qu’en étant trop intrusif on risque de déplaire, voire de couper la relation directe instaurée. Une bonne relation entre la marque et son client/utilisateur se fait dans le respect des codes et des moeurs de ces derniers. Le «rabâchage» médiatique (qui a largement fait ses preuves) est envisageable au travers des différents médias, c’est là tout l’intérêt du cross media. On ne s’impose pas sur le mobile de la même manière que sur la télévision des gens. C’est un média bien plus personnel, on risque donc de rapidement déranger. Il m’est déjà arrivé de ne pas recommander des outils que nous sommes en mesure de mettre en place parce que, par exemple, l’idée de «perpetual tracking» me déplait fortement.

Pour conclure, j’ai une réponse technique à toutes ces interrogations qui devrait vous faire sourire (c’est le but visé) : lorsque les «tracking systems» seront omniprésents sur les applications mobiles, Boom développera des applications dédiées à les brouiller. Et ce seront peut-être les app les plus téléchargées !

Boom-Mobile.ch