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Édito

La fin du tout (et du n’importe quoi) sauf Apple ?

Boro

Publié le

 

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Suite de l’Edito d’hier Apple, à la hauteur du Plan Peillon ?

Vers une approche des industriels enfin pragmatique ?

Pour autant, et en ce qui concerne Apple, verra-t-on beaucoup plus largement diffuser dans les classes les nouvelles solutions de la marque comme l’iPad ou l’iPad mini ? L’ institution scolaire s’est en effet très largement appuyée depuis plusieurs années sur les matériels à la Pomme pour expérimenter des solutions aujourd’hui aussi largement déployées que les «classes mobiles», ou le podcasting dans l’apprentissage des langues… avec des équipements bien souvent copiés par ses concurrents.

Beaucoup dépendra de la résistance au changement dont pourra faire preuve la petite caste des «sachants» de ce nouvel enjeu que sont les technologies du numérique, pour qui les solutions d’Apple ont sans doute le tort d’être d’un abord trop aisé et qui assurément ne leur reprochent d’être «propriétaires» que parce qu’ils entendent en confisquer – mais pour combien de temps encore – le monopole et la maîtrise des usages. Il est vrai que l’Institution reste très largement traumatisée, plus de 10 ans après, par la tentative de prise d’otage menée par Microsoft avec un premier accord-cadre à la fin des années 1990. Les coupables courent toujours…

Leur pouvoir de nuisance n’est ainsi pas à négliger, a fortiori lorsque l’on tombe sur des âneries du niveau de celles qui constellent par exemple le rapport n° IGEN-2012-036, remis au ministre de l’Education Nationale en mars 2012 et consacré aux enjeux et à la situation du manuel scolaire. Entre autres perles et stéréotypes, on y lit notamment qu’Apple a proposé des manuels scolaires à partir de janvier 2010 aux Etats-Unis à partir de son iBook Store, «bien entendu sous Mac» (p. 54, souligné par nous) et avec les formats fermés d’Apple, que le californien a également mis au point iBook Author une application gratuite permettant de créer des livres dont la distribution est «évidemment assurée par la plate-forme iTunes» (ibid, souligné par nous), tandis que l’impossibilité de lire les formats flash players utilisés pour nombre de manuels numériques, limite les activités possibles (ibid, p. 60, citation du rapport de l’inspection générale de novembre 2011 sur Le plan Ordicollèges dans le département de la Corrèze).

On pourra répondre à ceci – et en évitant de formuler d’autres stéréotypes qui veulent que les fonctionnaires en général et les enseignants en particulier soient forcément incompétents, en situation d’absentéisme ou en grève – qu’avec l’enthousiasme débordant dont font preuve la plupart des éditeurs français, on attend ici avec impatience des manuels scolaires mainstream débarrassés des DRM. En outre, iBook Author permet d’exporter des productions au format PDF, éventuellement de les distribuer de façon tout à fait gratuite sur l’iBooks Store ou ailleurs. Enfin, novembre 2011 (soit 4 mois avant la remise du rapport) est précisément la date où Adobe a annoncé l’abandon du support de la version mobile de Flash (c’est-à-dire pour l’ensemble des tablettes et smartphones), laissant tout loisir aux éditeurs pour se tourner vers le HTML 5, format on ne peut plus «ouvert» et depuis le début préconisé par Apple. Seul manque en effet à ce tableau presqu’idyllique un soutien sans arrière-pensées d’Apple au format ePub, y compris en ce qui concerne l’exportation à partir d’iBooks Author, comme c’est déjà le cas avec Pages…
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L’iPad, la solution qui fonctionne le mieux ?

Dans les faits pourtant, les expérimentations menées un peu partout en France autour du «support tablette» ont montré la pertinence de l’offre de valeur de l’iPad. En effet, seules ses concurrentes motorisées au minimum par la version 4.0 d’Androïd ont pu se montrer en mesure de rivaliser avec l’iPad en matière d’usages pédagogiques. Mieux : dans ce cas, les concurrents de l’iPad n’ont encore jamais pu démontrer qu’ils étaient meilleurs en matière de coûts. L’argument financier est pourtant le frein principal bien souvent mis en avant par les collectivités locales qui détiennent en dernier recours le chéquier, en période de disette budgétaire et de choix parfois arbitrés davantage en fonction de «lisibilité» immédiate que de perspectives à long terme.

Des choix pertinents sont pourtant possibles : en novembre 2010, le Conseil Général de Corrèze, pourtant en proie à des difficultés budgétaires, avait fait le pari d’équiper l’ensemble de ses élèves de 6e et de leurs professeurs avec 3 300 iPad. Il s’agissait même d’une expérimentation grandeur nature sur un nouveau matériel, inédite depuis celle baptisée «Un collégien, un ordinateur portable» et menée à partir de 2001 avec des PC dans le département de Landes.

Or, et à la différence du démarrage calamiteux du programme Landais, le volet matériel du plan OrdiCollège Corrézien est suffisamment encourageant pour que la 3e vague de déploiement d’iPad soit d’ores-et-déjà programmée pour janvier prochain, date à laquelle l’iPad représentera 75% du parc installé. Outre les usages, le taux d’indisponibilité est également à l’avantage de l’iPad, d’un point de vue strictement comptable : selon les chiffres de juillet que nous avons obtenus, les indisponibilités liées aux sinistres, mauvaises manipulations, «bricolage» des utilisateurs étaient de 3,26% pour les PC sous Windows, contre 2,89% pour l’iPad. Les chiffres sont même de 52,27% pour les PC contre 0,0018% (11 cas) pour des iPad 1 et 2 si l’on considère les pannes couvertes par la garantie constructeur, sur un parc constitué à parts égales d’iPads et de PC. Les portables ont en effet massivement été confrontés à des problématiques d’écrans défectueux, qui ont nécessité leur remplacement comme c’est d’ailleurs relativement fréquent dans ce type de déploiement.

Ordicollège 19 se prépare même à mettre en place un dispositif de Gestion des données de référence (Master Data Management), afin de mieux accompagner le développement des usages. Or c’est ce changement d’échelle que le plan «Faire entrer l’école dans l’ère du numérique» cherche précisément à favoriser. Il s’agit en effet de remobiliser les volontés autour du changement de paradigme nécessaire à la refondation de l’Ecole, alors que la France n’en finit pas de s’enfoncer dans les classements évaluant l’efficacité des différents systèmes éducatifs nationaux.

Reste à savoir dans quel environnement, et avec quels partenaires industriels. Apple, chez qui le chapitre des grands comptes est est loin d’être un point fort traditionnel, (c’est un euphémisme) et qui s’est trop souvent laissée vivre sur son réseau de revendeurs peut-elle cette fois se montrer à la hauteur ?

Lire aussi Apple, trop «facile» avec l’iPad?

Le Plan Peillon sur le site du Ministère

OrdiCollege 19