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Édito

Apple : un nouveau ”style de vie numérique”

Tim Cook et ses lieutenants ont présenté hier les éléments du nouveau hub numérique, avec en particulier un nouvel iMac 27 pouces Retina digne de tous les superlatifs

Boro

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Du keynote présenté hier par Tim Cook, Craig Federighi et Phil Schiller, les agenciers de Reuters, d’Associated Press ou de l’AFP ne retiendront probablement qu’un iMac 5K hors du commun, et à la rigueur le renouvellement de la gamme iPad Air et iPad mini. Peut-être sera-t-il également question de la mise à disposition par la marque à la pomme de la dernière version de son système d’exploitation pour les ordinateurs de la vieille école. De quoi en tous les cas, sur la forme, motiver un certain nombre de dépêches supplémentaires et faire ainsi fulminer un peu plus les gardiens de l’orthodoxie journalistique, qui trouvent que leurs camarades en font souvent trop dans leur couverture des sorties de la firme de Cupertino.



Sur le fond, au contraire, il n’est pas sûr que les mêmes relèvent quel point la courte présentation d’hier soir – 1h20 à peine, mais, est-ce pour des raisons fiscales, il n’y a pas eu cette fois sur scène de ménestrels irlandais – a montré à quel point l’Apple de Tim Cook était à présent maître de son sujet après 2 ou 3 années de réglage. Apple, après un premier cycle de refondation sous l’autorité de Steve, a désormais à sa disposition les moyens de concrétiser sous la direction de Tim sa vision d’une informatique personnelle au service du quotidien et de la créativité du plus grand nombre, débarrassée de sa gangue technique. Et ce, grâce à la maturation des composants, de la technologie et des réseaux de manière générale.

Le “hub” numérique dans les nuages

Ainsi, l’iMac 5K n’est sans doute pas, comme le suggère Phil Schiller avec son enthousiasme habituel dans le traditionnel communiqué de presse post-keynote, l’équivalent du premier Macintosh qui voici 30 ans « a changé le monde ». Il n’en demeure pas moins que celui-ci est le digne successeur de l’iMac DV/SE pour « digital vidéo » destiné aux professionnels du montage, et présenté par Steve il y a tout juste 15 ans au Flint Center for the Performing Arts (Centre Flint pour le Spectacle Vivant) à Cupertino, précisément là où Tim Cook a dévoilé le mois dernier l’Apple Watch ainsi que les 2 modèles de l’iPhone 6 : une machine de course, au sommet de la technique actuelle, qui ravira les monteurs vidéo.

_, Mais avant tout, il s’agissait de faire toucher du doigt la vision d’Apple d’une expérience numérique unifiée, pervasive – et même omniprésente diront certains, à tous ceux qui n’avaient pas eu la possibilité de découvrir cet été les différentes versions bêtas des OS proposés par Apple au public le plus large, ce qui n’était plus arrivé depuis les débuts de Mac OS X au début de ce siècle… Certaines des briques de cette construction ne sont certes pas nouvelles, depuis les iTools apparus en 2002, en passant par .Mac et plus récemment la tentative autour de Mobile Me. Mais les gains en termes de puissance et d’économie d’énergie réalisés par les composants lui permettent à présent de concrétiser – dans une expérience on l’espère cette fois réellement « sans coutures », ou plutôt « sans accrocs » – l’intuition géniale du hub numérique.

À ceci près que celui-ci ne s’articule plus autour du seul ordinateur : c’est à présent autour du nuage que gravitent les différents éléments de cette nouvelle expérience, et dont Apple a construit patiemment chacun des éléments qui la composent :

  • les appareils électroniques qui en sont le substrat physique, bien entendu, depuis l’ordinateur qu’il soit nomade ou résidentiel, l’iPhone, l’iPad, l’Apple TV et bientôt l’Apple Watch, mais également les 2 piliers que constituent iOS et OS X
  • et peut-être surtout des différents kits de développement logiciel qui permettent à Apple, en favorisant le développement « d’écosystèmes » autour de ses solutions – elle est d’ailleurs l’origine de la concrétisation du concept – de se constituer une « matrice » qui non seulement génère des revenus, mais qui contribue également à l’alimenter.
  • Ultime raffinement, avec Swift et Metal pour le logiciel, ou ses différentes certifications « made for… » pour les accessoires, elle maîtrise chacun des éléments ou presque de sa chaîne de valeur, tout en étant à même de continuer à optimiser la consommation en énergie et en ressources processeur de ses machines, que celles-ci soient posées sur un bureau, trimbalées au fond d’une poche ou attachées au poignet.

    Un « momentum » exceptionnel

Apple se trouve, de fait, devant un boulevard, après plusieurs années difficiles, et son équipe dirigeante le sait comme en témoignent les petites vannes qui ont émaillé la présentation d’hier. Cela est surtout vrai dans la mesure où Samsung, son principal concurrent, est à son tour empêtré dans un certain nombre de difficultés, avec un modèle économique du « carnet de réductions » au consommateur arrivé à bout de souffle, et toujours pas la maîtrise de son propre destin en matière de systèmes d’exploitation. Le Coréen se trouve littéralement prisonnier d’une « stratégie de la serpillière » dans laquelle l’a enfermé le positionnement inexpugnable d’Apple sur le haut de gamme, tandis que les fabricants chinois se positionnent chaque jour davantage sur les terminaux à faible valeur ajoutée. Chacun des 2 a empoigné fermement une extrémité du marché, et entrepris de tourner de son côté : ce sont du coup les résultats de Samsung qui se trouvent littéralement essorés depuis bientôt un an !

La firme à la pomme maîtrise certes comme aucun autre de ses concurrents l’ensemble des éléments de sa chaîne de valeur – matériel, logiciel et à présent services – au point qu’elle a pu se permettre depuis plusieurs années de proposer gratuitement les mises à jour de son système d’exploitation de bureau, et même depuis l’année dernière celle de sa suite de productivité, histoire de gêner un peu plus les velléités de retour de Microsoft. Mais cette maîtrise accrue implique également des responsabilités plus importantes, en matière industrielle et en particulier au niveau de la sécurité, au moment où Apple s’immisce de plus en plus dans ce qui fait l’intimité de ses clients. Perdre quelques photos ou même quelques données générées par un obscur instrument de torture « anti graisse de fesses » est une chose, se rater avec la centralisation ou la comptabilisation de données relatives au monitoring cardiaque ou glycémique des personnes, ou même la sécurité quotidienne de leur domicile en est une autre, laquelle aurait des conséquences très significatives sur l’image de la marque et son « effet de halo » qu’elle bichonne près de 10 ans maintenant. L’alerte a été chaude au moment de l’affaire de la fuite des photos de célébrités, et les dirigeants d’Apple, qui ont fait preuve d’une réactivité pas si habituelle, sont à coup sûr parfaitement conscients de l’importance de la problématique.

Mais c’est également le cas de la responsabilité sociétale de l’entreprise, à qui ses clients et l’opinion pourraient un jour demander davantage que de fabriquer des produits plus verts que ceux de la concurrence. Tim Cook, qui répète à l’envi vouloir contribuer avec Apple à « rendre le monde meilleur » (et on peut lui faire ce crédit), pourrait bien se retrouver à son tour une nouvelle fois, sommé de mettre en pratique son mantra, de la même manière que Steve Jobs avait pu être apostrophé par les militants du Computer Take Back Campain en 2005 à propos du fameux « Think different ». Apple saurait-elle cette fois éviter d’être prise à parti au nom des pratiques de l’ensemble des multinationales de la Silicon Valley ? La firme de Cupertino peut moins que jamais se passer du capital de confiance dont elle jouit auprès de ses clients, au moment où elle leur demande de lui confier ce qu’ils ont de plus précieux.

L’iMac 5K sur l’Apple store