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Édito

iPhone, malade de sa distribution ? (2)

Boro

Publié le

 

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Capture d'écran du site d'Apple

C’est à ce même problème de distribution qu’Apple qu’Apple se retrouve aujourd’hui confrontée avec l’iPhone, face non seulement à une masse de concurrents rangés sous une même bannière en apparence, même si Android est en réalité beaucoup plus hétérogène que Windows, mais peut-être surtout face à un champion prêt à «mettre le paquet» sur le plan marketing pour bénéficier d’un coup de pouce décisif de la part du vendeur, en définitive le dernier interlocuteur face au au client final.

D’un point de vue franco-français, les conditions imposées par Apple n’ont visiblement pas changé depuis que Bouygues et SFR ont esté en justice pour obtenir eux aussi le droit de commercialiser l’iPhone : est donc posée la question du moment choisi.

D’une part les marges des opérateurs français ont fondu comme une banquise avec l’irruption de Free sur le marché de la téléphonie mobile. Alors que la Commission européenne menace de taper du poing sur la table pour interdire les surcoûts liés à l’itinérance à l’intérieur des pays de l’union, c’est le système de la subvention des téléphones qui reste pratiquement l’unique source de marge pour les opérateurs, au moment où ils doivent investir dans les nouvelles infrastructures de la 4G.

Mais peut-être surtout, alors que Fleur Pellerin avait promis de s’intéresser de plus près à ce système de subventions qui ressemble par bien des aspects un prêt usuraire, on peut sans grand risque de se tromper poser l’hypothèse que, pris les doigts dans le pot de confiture, SFR et consorts ont argumenté qu’ils mouraient de faim parce que le grand méchant américain leur avait chipé leur goûter !

Mais au-delà du marché français, le problème posé à Tim Cook est pourtant beaucoup plus complexe, la fabrication et la distribution restant d’une manière générale ses principaux poids de vulnérabilité. Du moins, tant qu’elles ne seront pas entièrement maîtrisées par la marque en ce qu’elles conditionnent directement son principal point fort et son tendon d’Achille : sa notoriété. Avec Apple reparti pour un nouveau cycle, Tim Cook se retrouve confronté au même type d’équation que Steve Jobs en son temps, avec cependant des variables différentes. En l’occurrence, c’est tout le modèle économique de l’iPhone qu’Apple va devoir réinventer.

L’auto-renouvellement vs la subvention ?

Celui-ci avait d’abord été bâti sur le partenariat avec AT&T (ex Cingular), et le business model de la subvention du terminal sur 24 mois, avec en contrepartie de l’exclusivité de la distribution une loyauté sans faille de l’opérateur chois, puis exporté ensuite. Le bras tordu par une décision de justice, Apple a bien été obligée de constater sur le marché français que la présence sur plusieurs réseaux et plusieurs canaux de distribution à l’intérieur d’un même pays démultipliait ses ventes, et lui permettait même d’atteindre la place de numéro 1 : le modèle a donc été étendu peu à peu à l’ensemble du monde et a fonctionné jusqu’à l’arrivée d’un trouble-fête, capable à la fois de copier sa solution gagnante, tout en se montrant beaucoup plus conciliant dans les négociations avec les opérateurs.

Tim Cook a donc pris le taureau par les cornes, et réuni cet été les dirigeants de l’ensemble de ses Apple Stores dans le monde, pour annoncer le basculement de l’effort de la société vers ses Apple Stores pour la commercialisation de l’iPhone. Celui-ci est en effet considéré comme une passerelle essentielle pour les nouveaux venus vers les autres appareils de la marque, aussi vitale que l’iPod en son temps. Objectif ? Passer du chiffre de 20% d’iPhone commercialisés actuellement par les Apple Stores à celui de 50%. Le levier ? Profiter de la maintenance effectuée en réalité par les Apple Store sur la moitié du parc d’iPhone en circulation pour proposer des programmes de reprise de l’ancien en échange d’un mobile neuf, ou même reconditionné à la manière de ce que propose déjà l’AppleCare en ligne.

Le pari peut-il réussir ? En Europe où le réseau des Apple Store est encore embryonnaire, cela suppose à tout le moins une implication encore plus accrue des Apple Premium Reseller dans la commercialisation du téléphone de la marque. Après de multiples demandes dans ce sens, ceux-ci viennent, enfin, de pouvoir commercialiser l’iPhone sans fil d’opérateur à la patte, comme cela était déjà le cas pour les Apple Store. Cela n’est pourtant pas sans poser un certain nombre de problèmes : les marges consenties sur l’iPhone sont à peine équivalentes à celles du reste du catalogue, soit de l’ordre de 5 à 6 %, et ne couvrent pas les frais du personnel mobilisé : il faudra vendre beaucoup d’accessoires et d’AppleCare+ pour générer suffisamment de valeur supplémentaire. Même, et alors que la trésorerie est souvent le point faible des réseaux d’APR, le test grandeur nature effectué en Italie à mobilisé la quasi-totalité des encours consentis par Apple, au détriment des autres appareils du catalogue, ordinateur et iPad. Le challenge est donc à la mesure de l’enjeu, pour la marque qui ne doit pas cesser de se réinventer…