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Édito

Apple Watch, coup d’essai ou coup de maitre ?

Apple a dévoilé sa fameuse montre intelligente, l’Apple Watch. Luxueuse, personnelle, elle hausse la barre du domaine, sans pour autant rompre radicalement avec l’offre concurrente.

Arnaud

Publié le

 

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_ Apple a donc dévoilé sa fameuse montre intelligente, un produit pour lequel Cupertino a réuni une équipe de concepteurs uniques, mêlant intimement technologie matérielle, logicielle, design et mode. Sur ce “nouveau” segment des montres connectées, Apple arrive tardivement ; Samsung a déjà proposé, sans tellement vendre, 6 générations de Galaxy Gear, Motorola a déjà dévoilé la Motorola 360°, ronde. Autant dire qu’on attendait la Pomme au tournant. Cette Apple Watch répond-elle aux attentes, constitue-t-elle un coup de maitre, ou déçoit-elle et constitue, plutôt, un galop d’essai ?

Une montre qui se montre

Pour sa montre, Apple est parti de la fonction première de l’objet, donner l’heure, mais le donner avec classe, en traitant l’objet électronique avec autant de soin qu’une montre de luxe. À raison ! Une montre, c’est d’abord un objet qui donne l’heure, et qu’on a plaisir à porter, parce qu’elle nous plait, qu’on la trouve belle, et qu’on aime que les autres nous voient avec.



De cette idée de montre qui en soit vraiment une, part aussi celle du remontoir, qu’Apple désigne sous le terme couronne. Un remontoir, un peu surdimensionné, sans doute très confortable et plaisant à utiliser, qui libère l’écran des doigts, l’idée peut sembler couler de source. Et pourtant… Toujours dans la même optique, la Pomme a doté son appareil de nombreuses “faces” de montre différentes, qui affichent des informations que l’utilisateur peut adapter à ses besoins. 11 faces différentes, certaines classes, d’autres classiques, certaines carrément fantaisie. Voilà qui n’est pas sans rappeler ce qu’Apple proposait avec son… iPod nano multitouch.

Cependant, notez bien que le bouton molette, le remontoir, la couronne, est utilisé conjointement aux doigts, qui viennent interagir sur l’écran, qui sait d’ailleurs distinguer les petits tap des grosses pressions. De fait, ceci impliquera des aller-retours constant entre la molette et l’écran. À voir à l’usage comme ceci se conjugue. Hier, la démonstration de Kevin Lynch semblait plutôt montrer que les doigts de l’utilisateur sont plus souvent sur l’écran qu’à jouer de la molette.



Une montre qui se montre est un objet de luxe. Entendra-t-on prochainement un âne ou un mulet lancer un tonitruant «si à 50 ans tu n’as pas ton Apple Watch, tu as raté ta vie» ? Et la Pomme, depuis quelques années, aime bien aller trainer ses pépins du côté de l’industrie du luxe, par exemple en sortant des iPhone dorés, et toute une gamme d’accessoires du même tonneau. L’Apple Watch a tout d’un objet de luxe, même le prix – prix de départ 349 $ – que l’amateur de mode aura en outre tout loisir d’adapter à sa tenue du jour. «Quel bracelet pour aller avec ma chemise grise chérie ?»

3 collections, 12 bracelets, 2 tailles écran, plus de 30 combinaisons sont déjà annoncées pour cette Apple Watch, qui sera bien un objet… personnel.

Un accessoire pour iPhone



L’Apple Watch est dépendante des iPhone, sans eux elle ne peut (presque) pas fonctionner, encore que les précisions sur ce lien obligatoire soient encore peu nombreuses. La concurrence fait mieux : Samsung a présenté une montre plus autonome, capable notamment de passer des appels sans présence d’un smartphone.

Avec ce lien obligatoire, Apple limite fortement son marché potentiel : l’Apple Watch ne peut qu’être un accessoire pour iPhone. Logiquement, il s’en vendra moins que d’iPhone, le marché potentiel étant au maximum celui du smartphone pommé. On peut bien sûr imaginer qu’Apple “ouvre” l’Apple Watch à Android, finalement le produit dialogue en bluetooth 4.0 avec un smartphone, et rien n’empêche vraiment un portage. Mais, on doute qu’Apple considère cette idée comme prioritaire. Au contraire, la Pomme peut-elle jouer l’effet de halo… à partir de sa montre qui générerait l’achat d’iPhone.

L’Apple Watch fait fonction, en effet, de télécommande pour l’iPhone, ou même un Mac. On peut, par exemple, déclencher une photo sur l’iPhone depuis la montre, contrôler iTunes, sur le Mac ou sur l’iPhone. Sinon, celle-ci reçoit les notifications des apps qui tireront parti de WatchKit.

Apple, c’est le mariage logiciel et matériel

L’Apple Watch dispose d’une interface terriblement aboutie, qui semble parfaitement fignolée, avec, pour chaque usage, la question du meilleur moyen possible pour préserver simplicité d’usage et possibilités fonctionnelles. La métaphore des applications dans lesquelles on plonge est étonnante. L’interface pour répondre à des messages, qui sont analysés afin de proposer des “boutons réponses” adaptés, est bien conçue. Pas de clavier, sur cette montre, et c’est tant mieux .

Les prouesses matérielles sont nombreuses également, même si l’autonomie – on parle de 24 heures – reste une grosse question. Le système de fixation des bracelets a l’air très ingénieux, de même que les boucles de fermeture, pensées pour chaque type de bracelet. L’écran Retina, surmonté de saphir dans 2 des Collections, semble de toute beauté, le système de recharge par induction, avec fixation magnétique semble conforme aux exigences de perfection des utilisateurs pommés.
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Le moteur haptique a l’air d’être un modèle du genre. Soit dit en passant, ce moteur est capable d’indiquer des informations variées, en nuançant subtilement ses messages vibratoires. Par exemple, en guidage Plans, la montre vibre à chaque changement de direction, indiquant par la nature du retour de force, s’il faut aller à gauche ou à droite. Voilà qui doit ouvrir des possibilités intéressantes par rapport, par exemple, aux personnes souffrant d’une déficience visuelle, ou auditive. De même, le System On Chip S1 semble un bel exemple du niveau d’intégration maitrisé par Apple.


Des lacunes

Objet non indépendant, l’Apple Watch souffre également d’un défaut qui, rapporté à une montre, nous semble significatif : elle n’est pas étanche, tout juste résistante à l’eau. On peut, pour le dire clairement, se laver les mains sans enlever sa montre, mais certainement pas aller nager.

La montre ne sera pas la même pour tous, mais nous ne faisons pas ici référence à son extrême capacité de personnalisation : elle sera différente chez les gauchers et les droitiers. Clairement conçue pour ces derniers, elle devra être retournée pour être utilisée par un gaucher, avec la molette qui passera au bas du cadran, au lieu du haut pour les droitiers. Un choix éventuellement discutable mais on imagine qu’Apple gagne à limiter le nombre de modèles.

Cette Apple Watch est bien séduisante, et Apple parvient, sans difficulté, à hausser la barre du secteur des montres intelligente. Elle n’est peut-être pas la plus capable, ni nécessairement la plus design, mais elle est sans conteste la montre la plus aboutie sur le plan fonctionnel, témoignant de l’imbrication intime entre logiciel et matériel, la spécialité des spécialités d’Apple.

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Cependant, limitée aux possesseurs d’iPhone, nous doutons un peu que cette version 1 soit un succès considérable en matière de vente. Il ne nous semble pas que l’Apple Watch de première génération apporte des novations fonctionnelles si importantes qu’elle «pousse les ados à porter quelque chose au poignet». Il faut bien sûr patienter, le temps des premiers tests, le temps des premiers développements logiciels. L’Apple Watch est appelée à évoluer, et les prochaines itérations sauront sans doute capitaliser sur ce qui aura été appris avec cette première génération.

Cette Apple Watch 1 trouvera cependant sans doute son public, mais celui-ci sera le même que chez les concurrents : une agrégation de segments de publics, intéressés par une fonctionnalité spécifique. Un sportif, pour mesurer ses exploits, un geek, pour envoyer des XOXO dessinés (une fonction quand même très gadget), une fashion victime. Monsieur tout le monde ? Pas nécessairement.