Autopsie de l’Apple Expo 2005

Nos continents dérivent lentement, et en permanence, depuis l’unique bout de terre originel baptisé Pangée provoquant une réorganisation des parties émergées de la planète. C’est ce que l’on appelle la tectonique des plaques. Il se pourrait bien que la Pomme reprenne cet état de fait à son compte depuis le retour du CEO en 1998. Nous pourrions en effet le penser, en regardant de plus près les dernières nouvelles émanant de Cupertino : pas de traditionnel Keynote cette année à Paris, une présence Apple « officielle » à la MacExpo de Londres, des annonces de produits ou de logiciels toujours à l’improviste. Il semblerait que la Grande-Bretagne revienne à grands pas dans la course en tant qu’épicentre européen pour Apple. Mais aussi l’Allemagne qui connaît une MacExpo à Cologne. Ces deux pays semblent plus prometteurs en termes de vente et de parts de marché que la France ?

L’Apple Expo vit-elle ses dernières heures ?

Un grand nombre d’acteurs du monde Mac, du domaine logiciel et matériel, pensent que la manifestation ne devrait pas continuer à exister dans un avenir proche. Ou du moins, perdre de sa spécificité européenne pour devenir uniquement une vitrine anodine des nouveautés du monde Mac. Beaucoup d’exposants cette année nous ont « glissé » à l’oreille qu’ils n’avaient jamais vu une telle Apple Expo aussi petite (cf notre reportage Nano Expo 2005), aussi calme, aussi insipide. Ils avaient l’impression, et nous avec, que nous étions dans un hall de supermarché à lécher les vitrines comme nous le faisons le samedi après-midi en famille. Mais certainement pas dans un endroit « explosif » de « haute technologie Mac » comme nous avions pu le connaître de par le passé.
Parallèlement, d’autres acteurs de ce même monde Mac pensent au contraire que cette exposition a été un bon cru, au vu du nombre de participants notamment, et nous rigolent au nez quant nous prédisons une disparition de l’Apple Expo en France. Dont acte.

Toutefois, dans un premier temps, il existe un phénomène mondial qui touche tous les salons de ce genre quel que soit le support : les espaces dédiés rapetissent, sauf pour l’automobile et l’agriculture dans l’Hexagone. En effet, ces grandes messes coûtent de l’argent et ne rapportent pas autant qu’elles devraient à l’ère de l’Internet et de l’information en temps réel. Le consommateur peut effectuer ses achats toute l’année et non plus en suivant les rythmes annuels historiques imposés par ce genre de salon. Ceci étant dit, Apple suit ce mouvement lié à l’explosion d’Internet et sa politique de communication a changé. Ce serait donc une simple évolution au vu du développement massif du réseau Internet. En effet, les annonces de nouveaux produits ne se font plus durant les grands shows traditionnels comme nous en avions l’habitude mais tout au long de l’année de façon imprévisible. D’une part, cela coûte beaucoup moins d’argent à la firme de Cupertino, et d’autre part cela permet une réactivité immédiate. En permettant d’entretenir et de focaliser l’attention sur Apple…
Mais d’autres facteurs peuvent laisser à penser qu’il ne s’agit pas seulement d’une évolution, mais que la France est en train de perdre l’exposition au profit d’un autre territoire. Lequel ?

Londres devant Paris

En matière de présence « physique » c’est Londres qui décroche le pompon avec ses deux Apple Store ouverts depuis quelque mois. Ce n’est certainement pas anodin si la firme de Cupertino a décidé de lancer son opération de « bétonnage » en premier lieu sur le sol de Sa Majesté. La langue est commune me direz-vous, certes. Mais cela ne suffit pas ! La capitale française, siège de l’Apple Expo européenne annuelle, ne voit encore rien venir. Le CEO Steve Jobs avait toutefois officieusement glissé à RXL que cela était prévu pour 2007…
Actuellement vous ne pouvez bénéficier que de la vente en ligne via l’AppleStore, et bien évidemment des Apple Centers disséminés sur l’ensemble du territoire. Comment un pays qui ne possède aucun point de vente physique émanant directement de Cupertino pourrait être le pays le plus représentatif de la présence Apple en Europe ? La Grande-Bretagne est beaucoup plus séduisante. Car aujourd’hui la priorité d’Apple n’est plus l’historique secteur de la PAO qui était très bien implanté, notamment en France. C’est plutôt la musique, le hub numérique et autre convergence liée au son/vidéo. Et peut-être devenir une entreprise réellement « grand public », ne l’oublions pas.

Dernier signe avant-coureur de la migration, c’est bien évidemment la présence pour la première fois officielle de la Pomme avec son stand noir et ses banderoles, à la MacExpo de Londres du 27 au 29 octobre. Cette manifestation alternative est devenue culte et indispensable aux utilisateurs de Mac anglais qui ne pouvaient pas se déplacer et qui se sont sentis délaissés par Apple. D’ailleurs M. Pascal Cagni, le Président Apple Europe, s’est expatrié depuis peu en Angleterre… comme quoi !

Les PDM et % divers

Le marché britannique est revenu dans la course des ventes au niveau du matériel, la part de marché Apple est à la hausse sur le sol anglais et fait figure de bonne élève européen. Le phénomène musical, une véritable explosion de l’autre côté du tunnel sous la Manche. ITMS UK fait tout bonnement un vrai « carton » en la matière.
Les Anglais versent plus de dividendes à Apple, ils parlent la même langue et n’oublions pas que les services opérationnels sont encore basés physiquement et juridiquement (surtout 🙂 en Irlande. Alors pourquoi ne pas rapprocher ces deux îles distantes de quelques kilomètres, cela semble plus logique pour réduire les frais de transport du grand stand enrobé de noir. L’Allemagne aussi voit la part de marché Apple progresser assez significativement ces derniers temps, et les Teutons sont friands de musique.

Alors vous y croyez… ?

Apple aurait-elle décidé d’éloigner son centre européen septentrional de la France au profit de celui de la Grande-Bretagne ?
Il semblerait in fine que tous les voyants de l’opération soient allumés, et n’attendent plus que leur passage officiel au vert… Pomme, bien sûr.