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Justice

Justice : Posner contre le brevet logiciel

iShen

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C’est pour Reuters que le juge Posner, celui qui avait mis fin au procès ouvert entre Apple et Motorola, précise sa pensée concernant la croissance exponentielle des brevets dans le secteur des smartphones.

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Faisant un parallèle entre les coût de développement des logiciels et celui de la recherche dans le milieu pharmaceutique, Posner se demande si toute industrie a vraiment besoin de brevets (sans se limiter d’ailleurs expressément au domaine du logiciel), une assertion qui fera sans doute polémique alors même que des entreprises comme Apple vivent de leurs différences avec la concurrence et que toutes les industries couvrent leurs innovations et le design de leurs produits par des brevets divers.

L’exemple du secteur médical, qui serait lui légitime pour tout couvrir de brevets, n’est pas forcément le mieux choisi : la privatisation de l’accès au soin ne va pas de soi puisqu’elle prive certains pays de médicaments spécifiques et pourtant vitaux, couverts par des brevets qui en rendent la duplication compliquée voire impossible. On peut estimer qu’il s’agit là de choses plus graves au final que l’interdiction temporaire d’un smartphone dont quelques lignes modifiées dans le code permettent le retour dans les échoppes. Visiblement, pas pour le juge Posner qui avait déjà estimé que l’interdiction, même temporaire, de certains mobiles Motorola causerait un tort irréparrable au marché.

En fait, Posner semble clairement considérer aujourd’hui qu’il n’y a plus d’utilisation légitime des brevets dans la partie mobile. Apple, ainsi que d’autres acteurs, n’utiliseraient leurs brevets que pour empêcher les concurrents de venir sur le marché, et pas pour défendre la propriété intellectuelle de leurs inventions. Si les abus sont parfois manifestes, on peut voir aussi l’extension de la copie autorisée sans restriction sur un marché donné comme un gros gain accordé à priori aux “suiveurs“, avec en bout de course la possibilité pas forcément reluisante d’une homogénéisation totale de l’ensemble du secteur, avec des appareils aux fonctions et implémentations de fonctions toutes identiques.

Mais cette perspective gêne moins Posner que l’ouverture globale et sans frein à tous les acteurs possibles, histoire de doper la concurrence sur le marché. Sur le strict plan économique, cette position se défend.

Apple a sans doute ses torts dans l’expression d’un ras-le-bol actuel qui, dans l’extrémisme de certaines prises de position, a finalement peu de chances de trouver une concrétisation. En attaquant sans relâche et sans peine (Posner note bien l’énorme cash d’Apple qui lui permet d’aller en justice sans se soucier des coûts financiers), en portant plainte à nouveau y compris lorsqu’un premier jugement lui a été favorable, Apple donne la désagréable impression d’un acharnement qui va souvent au delà de la seule défense de sa différence.

A contrario, le juge Posner, qui avoue sans fard ne pas faire parti de la génération smartphone, prône peut-être à rebours une situation de facilité (la fin de tous les brevets) qui, sous couvert de protéger la concurrence, limiterait sans doute l’intérêt de ce marché pour les innovateurs qui seraient sans cesse à la merci de la copie intégrale de leur travail (c’est déjà ce qu’il se passe parfois alors même que le système des brevets est en vigueur).

Gageons que c’est sans aucun doute une solution médiane qui émergera de l’imbroglio actuel, au delà des humeurs du temps, permettant à la fois un développement sain du marché ainsi qu’un système rationalisé de protection de la propriété intellectuelle.

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